Autour de Joseph Joachim

Concert des 11 et 12 décembre 2016

Stéphane Cem Kilic (1981-)
« Sonata Fantasy », pour violon et piano (2010)

  1. Fantastique, sombre, vivant
  2. Rêveur
  3. Tel le lever du jour

Ambroise AUBRUN violon
Anne-Lise LONGUEMARE piano


Franz Schubert (1797-1828)
Trio n°2 en mi ♭ majeur, D. 929 (1827)

  1. Allegro
  2. Andante con moto
  3. Scherzo
  4. Allegro moderato

Ambroise AUBRUN violon
Maëlle VILBERT violoncelle
Julien HANCK piano


Claude Debussy (1862-1918)
Prélude à l’après-midi d’un faune, L. 86 (1891-94)

Orchestre Les Déconcertants
Pierre-Alexis TOUZEAU direction


Joseph Joachim (1831-1907)
Concerto pour violon n°1 en sol mineur, op. 3 (1857), Allegro

Ambroise AUBRUN violon
Orchestre Les Déconcertants
Pierre-Alexis TOUZEAU
Julien HANCK


 

Note de Programme

Joseph Joachim (1831-1907)
Concerto pour violon n°1 en sol mineur, op. 3 (1857)
durée d’exécution : 22 minutes environ

 

«Joseph Joachim is another violinist, of fifteen, who has now accomplished, what many of the most celebrated players have not yet achieved. He has the most complete command over the instrument and executes music of all schools from a fugue of Bach to a caprice of Ernst and Bériot with equally marvelous facility.» The Weekly Herald (New York), August 31, 1844

L’on ne se doute pas toujours qu’au royaume des « petits maîtres », de ces messieurs que l’on connaît davantage pour leurs cadences que pour leurs concertos, se cache tant de fureur, tant de mystère ! Dans la lignée des Henri Vieuxtemps et des Louis Spohr, Joseph Joachim est de ces violonistes virtuoses qui ont donné leur vie et leur talent à la gloire de contemporains plus brillants ; dédicataire du Concerto pour violon de Brahms, mais également ami proche de Mendelssohn, Liszt, Berlioz, Schumann, on aurait dit qu’il s’est effacé pour mieux leur laisser place. Pourtant, sous le regard barbu, une grande force musicale est prête à bondir ; écrivant merveilleusement pour son instrument, il sait l’exprimer à plein dans ce feu noir, ces jets expressifs qui se terminent presque toujours par des points d’orgue.

Si Joachim ne déborde pas tant de la ligne, offrant des harmonies assez classiques, il fait entendre dans cette œuvre de jeunesse des interrogations, des angoisses fin-de-siècle que même Brahms n’offrira guère dans son propre concerto, pourtant postérieur (1878). Un rejet de la « grande forme » post-beethovénienne l’amène dans cette écriture hallucinée, aux démarcations très diffuses, dont le rythme mâtiné de pauses et de dialogues est celui d’une scena opératique. L’idée musicale cachée sous ce concerto est pourtant bien simple : une habile conjugaison de demi-tons et d’octaves ; idée aussi bien à la base du motif do#-ré-mi♭-ré, répété au violon, que des nombreuses variations très techniques qui composent les solos et cadences. Tandis que d’incessants rappels du Style Hongrois apportent un agréable effet de vêture, la nudité stylistique de certaines cadences permet un face-à-face poignant avec l’instrument. Dans ce climat de forte tension harmonique, le violon alto fait entendre à plusieurs reprises un leitmotiv, le très hypnotique do#-ré-ré-si♭, que l’on retrouvera grimé dans des thèmes secondaires, et décliné sous toutes ses formes. C’est avant que le violon prenne subitement la parole, parcourant (déjà !) toute sa tessiture en quelques mesures ; énoncé que confirme l’orchestre dans un élégant tutti. Une seconde atmosphère est introduite avec un Etwas Ruhiger [plus calme] en majeur, faisant grand cas des pupitres de bois. C’est avant que le soliste y coupe court, le temps d’une cadence aux périlleuses doubles-cordes ; une technique risquée pour la justesse, qui néanmoins reparaîtra plusieurs fois dans le concerto, associée à des démanchés et sauts d’octaves particulièrement virtuoses. Le concerto se clôt sur un Presto assai foudroyant, le soliste y atteignant un impressionnant sol suraigu avant les deux coups de tonnerres finaux.

Julien Hanck